L’agence américaine S&P Global Ratings a annoncé avoir placé la note souveraine de Madagascar (« B-/B ») sous surveillance avec implication négative (Credit Watch Negative). Cette décision est expliquée par « la montée des incertitudes politiques et économiques qui fragilisent la Grande île depuis plusieurs semaines ». Mais l'agence prévoit déjà une réévaluation de la situation dans 3 mois.
Selon l’agence, le contexte qui prévaut dans la Grande Ile est encore marqué par une certaine instabilité politique ainsi que des doutes entourant la gouvernance du pays. « Nous pensons qu’une transition pourrait présenter des risques pour la continuité administrative, affectant la capacité du nouveau gouvernement à honorer ses obligations commerciales existantes », a précisé S&P dans sa note d’information. Ainsi, S&P Global Ratings a revu à la baisse ses prévisions de croissance du PIB réel à 3 % sur la période 2025-2026, contre 4,1 % auparavant.
L’agence anticipe également un déficit budgétaire moyen de 5,3 % du PIB, reflet de la dégradation des recettes publiques et de la hausse probable des dépenses sociales et sécuritaires. Cette révision intervient dans un contexte marqué par la chute du régime Rajoelina et le début d'une période de transition. Le mouvement de contestation "Gen Z", initié par une jeunesse excédée par les pénuries d’électricité et d’eau, la mauvaise gouvernance et la dégradation des conditions sociales, a rapidement pris une tournure politique. Les manifestants vont alors bénéficier du ralliement d'une partie de l'armée qui va précipiter la chute du pouvoir et le départ en exil de l'ancien président.
La transition est désormais dirigée par le colonel Michael Randrianirina et le Premier ministre Herintsalama Rajaonarivelo, issu du secteur privé. Les nouveaux dirigeants, tout en promettant des élections dans un délai de deux ans, ont fait du retour à l’ordre et à la stabilité leur priorité. Mais si la situation inquiète encore certains investisseurs, les partenaires internationaux se veulent plus optimistes. Roland Kobia, l'ambassadeur de l'Union européenne à Madagascar, a salué dernièrement la volonté des nouvelles autorités de « mener Madagascar vers plus de démocratie, d’Etat de droit, de bonne gouvernance et de lutte contre la corruption ». Quant à la France, elle a souligné son souhait d’orienter sa relation avec le pays « selon les besoins exprimés par les nouvelles autorités et par la population ».
Malgré ce contexte particulier, S&P a cependant indiqué que la dette publique de Madagascar demeure modérée et largement concessionnelle, ce qui limite les risques immédiats de défaut de paiement. Toutefois, la forte dépendance du pays vis-à-vis des bailleurs internationaux – notamment le FMI, la Banque mondiale et l’Union européenne – représente un facteur de vulnérabilité. Un éventuel gel des appuis budgétaires ou une suspension des programmes d’aide risqueraient d’aggraver les déséquilibres macroéconomiques et de compromettre la reprise économique. S&P a précisé qu’elle réévaluera la note souveraine de Madagascar d’ici trois mois, en fonction de l’évolution de la stabilité politico-économique, de la continuité administrative et du maintien du service de la dette. Si la transition parvient à restaurer la confiance et à relancer le dialogue avec les partenaires financiers, la note pourrait être stabilisée.



