La tension sociale n'est pas près de baisser à Madagascar. Après plusieurs jours de manifestations sévèrement réprimées par les forces de l'ordre et d'intense guerre de communication, le mouvement Gen Z appelle depuis mercredi à une grève générale à l’échelle nationale. Dans un contexte de crise économique et politique aiguë, les prochains jours pourraient marquer un nouveau tournant dans la contestation qui secoue la Grande Île.
La GEN Z, appuyée par les étudiants des universités, les syndicats, les acteurs de la société civile et les plateformes politiques de l'opposition, insiste sur le caractère inclusif et transversal de son mouvement. « Cette lutte te concerne, toi et ton quotidien. Elle concerne tout le peuple », affirme la GEN Z dans l'un de ses derniers communiqués. Enseignants, étudiants, fonctionnaires, commerçants ou travailleurs indépendants sont appelés à suspendre leurs activités pour exprimer un ras-le-bol généralisé face à la dégradation du niveau de vie. L’appel dépasse la simple revendication sociale : il se veut un cri du cœur collectif, symbole d’un peuple qui refuse désormais de se résigner.
Les prochaines journées de grève s’annoncent comme un moment de bascule. Après des semaines d’actions, la mobilisation semble gagner en organisation et en coordination. Les mots d’ordre circulant sur les réseaux sociaux témoignent d’une volonté d’unité : « Nous n’avons pas seulement besoin de héros, mais de cœurs unis » ou encore « Unis, aucun pouvoir ne peut nous faire plier ». Les manifestations s’annoncent plus énergiques, portées avec détermination par une jeunesse connectée et déterminée, mais aussi par une société civile qui ne cache plus son exaspération.
Sur le plan politique, la situation reste explosive. Malgré les promesses répétées du pouvoir, les difficultés quotidiennes persistent : délestages, hausse du coût de la vie, chômage, insécurité et violences des forces de l'ordre alimentent un profond sentiment d’abandon. Les déclarations du président Andry Rajoelina ont encore attisé la colère. Alors que le chef de l’État évoque un bilan de 12 morts depuis le 25 septembre, les Nations unies en comptabilisent au moins 22. La mort d’un étudiant à Antsiranana, qualifié par le président de « braqueur de bijouterie », a suscité une vague d’indignation dans tout le pays.
Face à ce climat de défiance, l’appel à la grève générale dépasse désormais le simple cadre revendicatif. Il traduit une volonté de rupture, un rejet de la peur et du silence. Les manifestants s'activent pour transformer la colère en action collective, fédérant toutes les forces sociales dans un même mouvement. « Les mobilisations dans la capitale et dans plusieurs villes du pays sont en passe d'ouvrir un nouveau chapitre de la contestation : celui d’un front commun, uni autour d’une même exigence de dignité et de justice. Entre la rue, les institutions et les foyers, c’est tout un pays qui semble prêt à faire entendre sa voix. Les jours à venir s'annoncent décisives pour l’avenir Madagascar, où la jeunesse et la société en général entendent désormais peser de tout leur poids dans la balance du changement », constate un observateur de longue date de la vie publique de la Grande Ile.
De son côté, la plateforme politique dénommée Firaisankina a réagi avec fermeté à la nomination du nouveau Premier ministre par le régime Rajoelina, qualifiant cette décision de « provocation » et de « signe évident de mépris envers la lutte que mène actuellement le peuple malgache ». Dans sa déclaration, ce collectif dénonce un passage en force du pouvoir en place, estimant que cette nomination intervient en pleine crise politique, alors que la population réclame un « changement en profondeur du système et du mode de gouvernance ». Rappelons enfin que la communauté internationale, à travers un communiqué signé par plusieurs chancelleries étrangères, a tenu à réaffirmer « son attachement à l'Etat de droit et aux droits universels que sont la liberté d'expression et de réunion pacifique ».