Kristina Douglass s’impose aujourd’hui comme l’une des figures majeures de l’archéologie participative et de la recherche sur les interactions entre sociétés humaines et environnements. Archéologue de renommée internationale et lauréate de la prestigieuse bourse MacFellow 2025, elle se consacre à l’étude de la coévolution entre les communautés et les milieux naturels, avec un accent particulier sur le sud-ouest de Madagascar, une région où la biodiversité exceptionnelle se heurte aux effets de plus en plus visibles du changement climatique.
Le parcours académique de cette ancienne du Lycée Français d'Antananarivo témoigne d’une rigueur scientifique remarquable. Diplômée du Dartmouth College en 2007, elle obtient un doctorat à l’Université Yale en 2016. Après une bourse postdoctorale Peter Buck au Musée national d’histoire naturelle du Smithsonian et une bourse Carnegie en 2021, elle enseigne l’anthropologie et les études africaines à l’Université d'État de Pennsylvanie entre 2017 et 2022. Elle rejoint ensuite l’Université Columbia comme professeure associée à la Climate School, où elle poursuit ses recherches interdisciplinaires. Ses travaux ont été publiés dans des revues de haut niveau, telles que PNAS, Conservation Biology, African Archaeological Review et Frontiers in Ecology and Evolution.
Depuis 2011, Kristina Douglass dirige le projet archéologique de Morombe, situé dans l’aire marine protégée de Velondriake, au sud-ouest de Madagascar. Cette région, où les pressions climatiques sont extrêmes, sert de laboratoire naturel pour comprendre comment les sociétés humaines ont su, au fil des siècles, s’adapter à un environnement hypervariable. Douglass y adopte une approche profondément collaborative : les habitants locaux ne sont pas de simples informateurs, mais des membres à part entière de l’équipe de recherche. Elle veille à ce que ses collaborateurs malgaches soient reconnus comme coauteurs, présentateurs et partenaires dans les espaces académiques.
Cette démarche participative permet de faire émerger de nouvelles perspectives sur les pratiques et savoirs des communautés. Ses projets se sont ainsi élargis à des thématiques innovantes, allant de l’éducation artistique dans les villages de pêcheurs à la réflexion éthique sur l’usage de la télédétection en archéologie. Grâce à ces échanges, son programme de recherche se nourrit des besoins, intérêts et visions des populations locales. Les résultats scientifiques obtenus par Douglass ont contribué à renouveler la compréhension des relations entre humains et écosystèmes sur l’île. Ses analyses zooarchéologiques ont révélé que les premiers habitants de Madagascar ont probablement coexisté pendant longtemps avec des espèces aujourd’hui disparues, comme l’oiseau-éléphant, remettant en question l’idée selon laquelle la présence humaine aurait entraîné immédiatement l’extinction de la mégafaune. En Nouvelle-Guinée, ses travaux sur les coquilles d’œufs de casoar montrent que ces oiseaux étaient élevés et gérés par les humains bien avant la domestication des poules.
Elle explore également les impacts réels des différents modes de subsistance pratiqués à Madagascar. Contrairement à l’hypothèse selon laquelle le pastoralisme aurait déstabilisé les paysages, l’imagerie satellitaire multitemporelle révèle que les pratiques traditionnelles de pêche, cueillette, agriculture ou élevage s’intégraient étroitement à l’équilibre écologique de la région. "Par son engagement scientifique et humain, Kristina Douglass propose des pistes essentielles pour élaborer des politiques de conservation qui respectent la biodiversité tout en préservant les cultures et les moyens de subsistance des communautés. Elle incarne une recherche qui non seulement documente le passé, mais éclaire les solutions pour l’avenir", a commenté un média régional.



