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SOUVERAINETE ECONOMIQUE | Une question brûlante dans un contexte de crise

L'actualité malgache est toujours dominée par la crise socio-politique de grande ampleur qui secoue le pays depuis plusieurs jours. Le départ précipité du président Andry Rajoelina, à bord d’un avion militaire français, a été largement rapporté par la presse internationale. Si aucune démission officielle n’a encore été annoncée, cette fuite laisse présager la fin de l'actuel régime et alimente toutes les spéculations sur la suite du processus politique. Mais les débats sur la souveraineté économique montent aussi en puissance.


L'actualité malgache est toujours dominée par la crise socio-politique de grande ampleur qui secoue le pays depuis plusieurs jours. Le départ précipité du président Andry Rajoelina, à bord d’un avion militaire français, a été largement rapporté par la presse internationale. Si aucune démission officielle n’a encore été annoncée, cette fuite laisse présager la fin de l'actuel régime et alimente toutes les spéculations sur la suite du processus politique. Mais les débats sur la souveraineté économique montent aussi en puissance.


Depuis plusieurs semaines, la tension monte entre les institutions, la rue et les forces armées, sur fond de contestations populaires initiées par la jeunesse et des acteurs de la société civile. Le chef de l’État, de plus en plus isolé, a tenté de brandir la menace d’un retrait des bailleurs de fonds internationaux pour justifier sa volonté de se maintenir à la tête du pays. Une stratégie jugée cependant peu pertinente par de nombreux observateurs, qui y voient un aveu d’impuissance face à une population déterminée à obtenir un changement profond du système de gouvernance.


Force est néanmoins de constater que le contexte économique, déjà fragile, ajoute à la complexité de la crise. Depuis des décennies, Madagascar dépend fortement de l’aide internationale pour financer ses politiques publiques et ses investissements. Les institutions financières, notamment la Banque mondiale, le FMI, l’Union européenne et la Banque africaine de développement, représentent des partenaires essentiels du développement national. D'où la stratégie d'Andry Rajoelina de mettre sur la table  un éventuel retrait de ces partenaires extérieurs qui, à ses yeux, provoquerait un effondrement des programmes économiques en cours et un durcissement des conditions de vie pour les populations les plus vulnérables.



Un modèle économique à redéfinir 


Mais pour nombre de Malgaches, la priorité est de mettre fin à "un régime corrompu et mafieux qui a mis à genou l'économie du pays et fait plonger des millions d'habitants dans la misère". La situation de crise réactive aussi un vieux débat : celui de la souveraineté économique du pays. Plusieurs voix, issues du monde académique, du secteur privé et des mouvements citoyens, plaident pour une redéfinition du modèle économique malgache, jugé trop dépendant des financements extérieurs. Pour ces acteurs, la crise actuelle démontre les limites d’une économie sous tutelle et appelle à un sursaut national fondé sur l’autonomie productive, la valorisation des ressources locales et la réforme de la gouvernance publique.



La crise actuelle démontre les limites d’une économie sous tutelle et appelle à un sursaut national fondé sur l’autonomie productive, la valorisation des ressources locales et la réforme de la gouvernance publique


Dans les rues d’Antananarivo, des slogans en faveur d’une « indépendance politique et économique réelle » sont bien visibles. Les manifestants exigent non seulement une transition politique pacifique, mais aussi une refonte structurelle de l’État, capable de restaurer la confiance et de promouvoir un développement équitable. Certains économistes estiment qu’il s’agit d’un tournant historique : soit Madagascar continue à dépendre des aides extérieures et reste vulnérable aux chocs politiques, soit le pays engage une transformation profonde de son modèle de développement.


Pour l’heure, le pays reste suspendu aux décisions d’un président absent, à un gouvernement affaibli et à une population plus mobilisée que jamais. La crise actuelle, au-delà de ses aspects politiques, pourrait bien devenir le catalyseur d’une réflexion nationale sur le sens véritable de la souveraineté malgache, à la fois politique et économique. Le défi sera de taille : bâtir une nation capable de se gouverner et de se développer par elle-même, dans un contexte mondial où l’indépendance reste, plus que jamais, une conquête fragile.



Haut niveau de corruption 


A noter que quelques jours avant l'éclatement du mouvement de contestation, le FMI relevait déjà des tensions budgétaires et un ralentissement dans la mobilisation des recettes domestiques. Selon la mission conduite à Antananarivo du 4 au 10 septembre, « les dépenses publiques exécutées au premier semestre ont excédé la collecte des recettes fiscales », appelant les autorités à activer des plans de contingence pour rester dans les limites du budget. Le FMI signalait également des difficultés dans le secteur minier et une « inflation en baisse, mais encore élevée » (7,9 % en juillet). Le Fonds insistait également sur la mise en œuvre du plan de redressement 2025–2028 de la JIRAMA, qui prévoit la modernisation des infrastructures, la réduction du déficit opérationnel et la diminution progressive des subventions publiques au secteur énergétique



A noter que quelques jours avant l'éclatement du mouvement de contestation, le FMI relevait déjà des tensions budgétaires et un ralentissement dans la mobilisation des recettes domestiques. Selon la mission conduite à Antananarivo du 4 au 10 septembre, « les dépenses publiques exécutées au premier semestre ont excédé la collecte des recettes fiscales », appelant les autorités à activer des plans de contingence pour rester dans les limites du budget.


Mais c'est cette même institution de Bretton Woods qui a aussi souligné qu'un haut niveau de corruption se traduit par un faible niveau de développement humain. Un constat que le Comité de sauvegarde de l’intégrité (CSI) a souvent rappelé afin de souligner les effets négatifs de ce fléau sur l’économie nationale. En 2023, le Comité a noté que « les estimations des services du FMI indiquent qu’une amélioration d’un point du contrôle de la corruption dans un pays s’accompagne d’une hausse des recettes fiscales de 4% du PIB ». Aussi, avec une nette amélioration de la gouvernance, la Grande île peut tout à fait prétendre à une amélioration significative de ses finances publiques. Une observation qui est devenue l'un des arguments majeurs des principaux défenseurs du renforcement de la souveraineté économique du pays.


A rappeler enfin qu'en 2009, Andry Rajoelina n’est pas arrivé au pouvoir par les urnes, mais à la suite d’un coup d’État politique. Alors maire d'Antananarivo, il a mené un mouvement de contestation contre Marc Ravalomanana. Soutenu par une partie de l’armée, il a finalement pris la tête du pays en dehors du cadre constitutionnel. Ce basculement de pouvoir avait été condamné par la communauté internationale et avait conduit Madagascar à une transition politique prolongée. Et à l'époque, les discussions passionnées sur la nécessité pour la Grande Ile de renforcer sa souveraineté économique et de lutter efficacement contre la corruption étaient déjà bien perceptibles. Des promesses ont été faites par les dirigeants mais rien de concret n'a été constaté...